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Campagne du Soldat Henri DUNEIGRE

33éme Régiment d'Infanterie




Henri DUNEIGRE est incorporé le 9 mai 1917. Il arrive au 107ème Régiment d'Infanterie qui combat alors en Champagne.


Au début d’avril 1917 alors que la 24éme division se préparait à prendre part à la grosse attaque de Champagne, elle demanda un bataillon de renfort. Le 1er bataillon du 107 lui fut envoyé à l’est d’Auberive, quartier du « Mauvais Coin ». Les préparatifs de cette attaque étaient formidables et nos poilus, depuis la Somme n’avaient pas perdus leur élan.

On voyait peu à peu approcher le grand jour, le bataillon ayant fait lui même tous les préparatifs ; apport des munitions, installation des crapouillots, exécution des tranchées de départ et des brèches ans nos réseaux. Certaines patrouilles hardies parcoururent même les premières lignes de l’ennemi.

Il faisait à peine jour, le 17/4/1917 à l’heure H. La neige nous aveuglait, mais l’élan fut magnifique. D’un bond, les objectifs sont atteints. Le bataillon voisin n’eut pas la même chance, et soit manque de préparation, soit supériorité de l’obstacle, il laissa un vide que l’ennemi aussitôt mit à profit, obligeant le 1er bataillon à abandonner une partie du terrain conquis, sous peine d’être coupé de sa base.

Malgré la terrible contre-préparation de l’ennemi, l’attaque fut renouvelée une 2ème fois à la tombée de la nuit, cette attaque eut un sort identique à la première. Ce n’est qu’à la troisième reprise que nos voisins parvinrent à gagner leur objectif et qu’une ligne solide et continue put être établie. Solide par la liaison des cœurs et des volontés, car dans le dédale des trous d’obus, il ne restait pas trace pour ainsi dire des tranchées et des boyaux.

En fin avril, après l’organisation de la position, le bataillon de Beaucorps rejoignit le régiment où l’avait précédé une lettre de félicitations du général Mordacq. C’est une distraction d’un autre genre qui se préparait ; notre attaque d’avril avait en partie réussi, le Boche voulait sa revanche. Quelques coups de main, dont la division s’était fait une renommée, nous en donnèrent bientôt la conviction ; l’ennemi préparait contre le secteur de Champagne une formidable attaque par les gaz.

Le premier coup de main fut fait près de la ferme de Navarrin ; une préparation de plusieurs jours méthodique e discrète permit d’installer une trentaine de crapouillots, de faire leur réglage, de rouvrir à l’insu des Boches d’anciennes tranchées de départ que nous avions abandonnées et encombrées de fils de fer. Trompés par notre préparation, par de fausses patrouilles sur d’autres points, les Boches commencèrent à riposter ailleurs et quand ils se ressaisirent pour faire barrage sur le chemin du retour, notre groupe franc était déjà rentré avec une dizaine de prisonniers ; le tout n’avait pas duré dix minutes et nous n’avions même pas un seul blessé.

A la fin de juin, une certaine activité de l’artillerie ennemie se manifesta sur le quartier Chalet, déjà mis assez mal en point lors d’un coup de main subi par le 138ème R I. Le 3ème bataillon qui occupait ce quartier avait un groupe d’observateurs de premier ordre qui put le 29 au soir , par une observation en première ligne , sous le tir de réglage ennemi, déterminer avec précision , le point d’attaque choisi et l’emplacement des pièces de l’ennemi. Quand le 30 avant le jour, l’attaque se déclencha tous étaient avertis ; notre artillerie put répondre du tac au tac avec précision. Le point menacé évacué par ordre était transformé en traquenard, ou les Boches ne trouvèrent personne, sinon des fusils braqués qui leur interdisaient le retour, plusieurs prisonniers restèrent entre nos mains sans parler des morts.

L’attaque par les gaz se précisait de plus en plus, méthodiquement notre artillerie cribla toutes les parties du front pour casser les bouteilles à gaz et les tuyaux. Fréquemment on voyait un nuage verdâtre au-dessus des tranchées ennemies indiquer le succès de nos tirs et qui devait ajouter aux pertes par bombardements, celles dues à l’asphyxie.

Le 3ème bataillon réussit le dernier de la saison au poste Loustonnau, Quartier Montagne et ramena quelques prisonniers. Mais cette opération faillit coûter cher aux brancardiers du bataillon qui rentrés les derniers avec des prisonnie blessés et repartis aussitôt apprenant que nous avions encore un blessé sur le terrain, furent pris dans un cloisonnement de mitrailleuses. Ayant passé toute la journée dans un trou d’obus, ils regagnèrent précipitamment nos lignes à la nuit tombante, au moment où une patrouille ennemie s’apprêtait à les cueillir, après les avoir blessés à coups de grenades.

Les premiers jours d’octobre, le régiment quitta le secteur de Champagne qu’il était revenu arroser de son sang pour la 2ème fois depuis le début de la guerre, et où les actes héroïques individuels ne peuvent être dénombrés. Les intenses bombardements de cette région au sous-sol crayeux et parsemés de bois de sapin, en avait transformé les lignes avancées en un paysage lunaire où l’on ne distinguait plus que des amoncellements blanchâtres et des troncs déchiquetés, où cependant, tranchées, abris profonds, et réseaux puissants, étaient toujours merveilleusement entretenus par un labeur ininterrompu de jour et de nuit.



Italie.

Le régiment était depuis un mois au repos et à l’entraînement dans de coquets village de la montagne de Reims, il fut brusquement transporté en Italie, où le recul de Caporetto jusqu’au Piave avait fait envoyer en toute hâte des divisions françaises et anglaises. Après avoir consacré quelques mois à l’organisation d’une portion du front du Piave, le 107ème RI se trouva affecté à la défense de l’Altipiano d’Asagio, où il avait de fortes présomptions de croire à une prochaine et puissante attaque des autrichiens. Le Commando Supremo après quelques hésitations, s’était décidé à prendre l’offensive quand le 15/6/1918 l’armée Autrichienne nous devança. En face des troupes françaises, elle trouva un mur infranchissable, à l’abri duquel les Anglais à gauche et principalement les italiens à droite purent rétablir une situation assez compromise.

Le régiment qui était en réserve, fut entièrement dépensé en renforts de la première ligne d’infanterie, le lieutenant Leblond et le capitaine mitrailleur Labarbarie se distinguèrent tout particulièrement. Un coup de main brillant exécuté le 19 par la compagnie Debat compléta la démoralisation de l’ennemi ; 72 Autrichiens restèrent entre nos mains.



Henri DUNEIGRE passe au 33ème Régiment d'Infanterie le 14 juin 1918.



A cette époque le 33ème RI cpmbat dans le secteur de Laversines-Cutry (Oise).

Le 9 juin, le colonel du 33ème est avisé que la 51ème D. I. relèvera, dans la nuit du l0 au 1 juin, la 151ème D. I. avec mission de défendre la tête du ravin de CUTRY.

Le colonel et plusieurs officiers partent reconnaître la position, dont, à la nuit, le régiment aura à assurer la garde. Dans la soirée, le commandant PRUNAUX-CAZER reçoit à TAILLEFONTAINE l'ordre de retourner à RETHEUIL. A minuit, le régiment se remet en marche pour occuper, face à l'est, la deuxième position sur le chemin de HAUTE-FONTAINE, MORTEFONTAINE, à hauteur de MORTEFONTAINE. A trois heures, chacun est à sa place.

Le 11 juin, le 33ème relève les éléments du 407ème et du 410ème au nord du ravin de CUTRY, en liaison à droite avec le 273ème, à gauche, avec le 73ème. Le régiment avait un front de 900 mètres environ ; les compagnies ne comptaient pas plus de 50 hommes à leur effectif, chaque compagnie de mitrailleuses, ne pouvait pas mettre en ligne plus de six pièces. Il n'existait ni tranchée, ni abri, et seuls, les seigles déjà hauts dissimulaient l'emplacement de nos troupes. Ce couvert devait d'ailleurs servir quelques heures plus tard à l'ennemi pour s'infiltrer et déborder notre position.

Le 12 juin, vers deux heures trente, un bombardement par obus de gros calibres et à gaz est déclenché sur les première et deuxième lignes, détruisant en quelques minutes tous nos moyens de liaison : téléphone, T. P. S., T. S. F.

A quatre heures, le tir de, l'artillerie s'allonge et l'attaque ennemie se déclenche, brutale, irrésistible. Notre défense est acharnée, les mitrailleuses du 3ème bataillon brûlent en quelques minutes quatorze caisses de cartouches. Par un blessé, le colonel apprend que les Allemands ont débordé le ravin de CUTRY et atteignent les pentes sud de ce ravin. Le régiment est attaqué sur tout son front avec la même violence, il n'a pour toute réserve que la 10ème compagnie chargée de garder la cote 128.

A six heures, le 3ème bataillon tient toujours dans le ravin de CUTRY, le 2ème bataillon résiste avantageusement sur le plateau en liaison avec le 73ème.<§p>

A six heures quinze, un éclaireur monté apporte au colonel la nouvelle de l'anéantissement tragique du 1er bataillon. Complètement encerclés, officiers et soldats ont brûlé jusqu'à leurs dernières cartouches et se sont fait tuer sur place, faisant payer chèrement à l'ennemi le sacrifice de leur vie. Le 3ème bataillon devait bientôt subir le même sort. Dès que l'ennemi eut allongé son tir d'artillerie, le capitaine RICATTE porta ses deux compagnies sur la crête, à environ 50 mètres au delà du ravin pour barrer la route aux soldats du Kaiser. Mais écrasés par le nombre, les survivants des 9ème et 11ème compagnies se replient sur CUTRY, dont ils vont retarder l'accès aux Boches. Mitrailleuses et fusils-mitrailleurs, placés dans les maisons crénelées, fauchent les vagues d'assaut qui, sans cesse, abordent le village. La résistance tombe avec le dernier défenseur.

Vers six heures trente, sous la poussée constante de l'ennemi, la droite du bataillon DE HEINE se replie en crochet défensif. La compagnie de réserve se porte sur son emplacement de combat. Tous les éléments encore disponibles du régiment (pionniers, agents de liaison, téléphonistes) placés sous les ordres des lieutenants DUSSART et DEBRET, participent à la défense du plaleau.

Le commandant du 2ème bataillon rétablit un instant la situation par une vigoureuse contre-attaque ; sur la gauche, la pression s'accentue toujours, mais chaque pouce de terrain cédé est chèrement disputé. A ce moment, le colonel désigne le chef de bataillon PRUNAUX-CAZER pour prendre le commandement de cette partie de la ligne, avec ordre de tenir coûte que coûte. Cette mission est accomplie à la lettre, et jusqu'à neuf heures trente, les Boches ne peuvent déboucher du plateau. La droite du régiment, tenue par le 2ème bataillon, résiste toujours avec acharnement ; son chef est blessé au moment où il encourageait la défense. Débordé complètement, il doit se replier en combattant sur la route de LAVERSINE-AMBLENY. Le P. C. du colonel et sa liaison sont menacés d'encerclement, mais le lieutenant THELLIER, porte-drapeau, organise rapidement avec quelques hommes une barricade qu'il défend avec une énergie farouche; il ne consent à se retirer que sur l'ordre formel de son chef de corps. En se repliant sur les pentes ouest de la route LAVERSINE-AMBLENY.

Il était alors onze heures. Le lieutenant SORREL, reçoit l'ordre du général commandant l'I. D. de porter les hommes qu'il a réussi à grouper dans les tranchées du G.M.P., au nord-ouest de CŒUVRES, en liaison à gauche avec le 73ème R. I., et à droite avec la compagnie 1/13 du génie. Grâce à l'énergie et au sangfroid de cet officier, la situation de ce côté se rétablit assez rapidement et la marche de l'ennemi fut arrêtée.

Dans l'après-midi, le chef de bataillon PRUNAUX-CAZER prend le commandement d'un groupement constitué par des éléments du 33ème, du 273ème et auquel vient s'adjoindre, dans la soirée, un bataillon du 9ème zouaves. Il doit interdire à tout prix à l'ennemi l'accès du plateau à l'ouest de CŒUVRES.

Toute l'après-midi, l'ennemi cherche, avec de fortes patrouilles, à s'infiltrer dans nos lignes; il est maintenu échec. La nuit fut relativement calme et employée à organiser solidement la position. Le 13 juin, l'ennemi ne cherche pas à renouveler ses attaques. Vers quinze heures, le groupement PRUNAUX-CAZER est relevé par le 9ème régiment de zouaves.

Le 14, vers huit heures, les débris du régiment sont réunis à RETHEUIL où ils doivent cantonner. Le 15 juin, le général LACAPELLE, commandant le 1er C. A., réunit les officiers et soldats survivants du régiment et, les larmes aux yeux, leur fit part de la satisfaction que lui avait donnée le 33ème, au cours de ces dures journées. Il avait subi (des renseignements précis et des documents recueillis sur des prisonniers en faisaient foi) une des attaques les plus formidables que les Allemands avaient faites au cours de la présente offensive.

Le 16 juin, la 51ème D. I. doit se porter dans la zone de NANTEUIL-LEHAUDOUIN par camions automobiles.



Dormans (14 et 15 juillet 1918).



Le 1er juillet, vers vingt heures, le33ème débarque à la lisière nord des bois d'Igny-le-Jard, à l'ouest d'Épernay. L'état-major et le 2ème bataillon cantonnent à Igny-le-Jard, le 1er bataillon à Comblizy, le 3ème bataillon à Nesles-le-Repons.

Le régiment est employé à l'aménagement des différentes positions ; le secteur est d'un calme déconcertant, inquiétant même. Le 8 juillet, les opérations de relève s'effectuent sans incident. Le 3ème bataillon, remplacé dans le quartier de Port-à-Binson par deux bataillons de la 10ème D. I., vient cantonner de nouveau à Neslesle-Repons. A son tour, le 1er bataillon monte en secteur relever aux avant-postes un bataillon du 73ème R.I. sur les bords de la Marne, au sud de Verneuil.

Le lendemain, 10, le colonel prend le commandement du sous-secteur (du pont de Verneuil à la ferme Amour-Dieu). La division fait partie du 3ème C.A. (10ème armée). Les 2ème et 3ème bataillons se portent sur la ligne de résistance, établie aux lisières nord du bois des Plants et de la forêt de Bouquigny.

Les 11, 12, 13 et 14 juillet se passèrent sans incident. Cependant, les bruits qui se colportent depuis quelques jours sont reçus comme oiseaux de mauvais augure. Ils sont précisés par les déclarations d'un déserteur : l'offensive allemande doi commencer le soir de notre Fête nationale, à minuit. En effet, il est à peine minuit dix que se déclenche un bombardement d'une violence inouïe, exécuté avec un tel luxe de batteries que le 1e bataillon est immédiatement submergé et dans l'impossibilité de faire parvenir aucun renseignement. Le bombardement s'étend immédiatement et avec la même violence sur les bataillons de la ligne de résistance et jusqu'au sud du P.C. du colonel (Nesles-le-Repons). Tous les moyens de liaison avec l'avant sont anéantis. C'est par T.S.F. seulement que le colonel peut communiquer avec l’I. D.

Vers quatre heures, des coureurs, envoyés aux renseignements, rendent compte qu'il est impossible de déboucher de la ligne de résistance ; toute communication est devenue impossible avec le bataillon d'avant-postes, aucune demande d'artillerie, cependant, n'a été aperçue venant de cette unité. Les bataillons de soutien quittent les travaux et prennent les dispositions de combat, en liaison avec leurs voisins de droite et de gauche. Le colonel se rend à son poste de combat à la Grange-aux-Bois. En y arrivant, à quatre heures trente, il reçoit de nouveaux C.R. des bataillons de soutien ; le bombardement ennemi a fait subir d'énormes pertes au 2ème bataillon ; les Allemands ayant passé la Marne à Dormans s'avancent sur Vassy.

Vers six heures, les bataillons BOREL et GERBIER rendent compte que le centre tient toujours la ligne de résistance, mais qu'une infiltration est signalée par le ravin Amour-Dieu et le ravin de Vassy. Le colonel met à la disposition de chacun des deux commandements de bataillon un peloton, réserve de régiment, pour étayer la droite et la gauche de notre front. A six heures trente, la pression s'accentue aux deux ailes ; les mitrailleuses et F.M. font rage ; le canon de 37 et les stokes tirent sans interruption.

A six heures quarante-cinq, ordre est donné au 33ème de tenir ferme sur la position et principalement au sud-ouest. Le colonel prescrit au bataillon BOREL de se cramponner à la lisière du bois des Plants ; au bataillon GERBIER, de ne point abandonner la lisière nord de la forêt de Bouquigny.

Vers sept heures, la fusillade se ralentit ; à sept heures quinze, on n'entend plus rien. Que s'est-il passé ? A sept heures quinze le colonel le devine par le retour des agents de liaison qui n'ont pu toucher leur chef de bataillon : les Allemands sont au camp des prisonniers dans la forêt de Bouquigny. Le peloton de pionniers est déployé en tirailleurs à la lisière du bois des Plants. Il n'a vu revenir aucun soldat du 3ème bataillon ; par contre, à sept heures quinze, une patrouille, placée à la lisière ouest du bois, signale l'arrivée des Boches à 30 mètres du P.C. du colonel. Le colonel, sous la protection du peloton de pionniers, transporte son P.C. à la lisière du bois de Nesles, où il rassemble les éléments du régiment qui se replient. La défense est reportée sur le chemin nord-est-sud-ouest de ce même bois de Nesles, et avec trois mitrailleuses qui le rejoignent, il arrête momentanément la progression de l'ennemi. Notre ligne est prolongée jusqu'à la croupe 224, en liaison avec une compagnie du 3ème génie, notre droite s'appuyant au 33ème R. I. colonial. Il est à ce moment midi ; les éléments qui ont pu rallier sont regroupés. Le dispositif du régiment est alors le suivant : les pionniers, des éléments du 3ème bataillon tiennent à l'est de Nesles-le-Repons, en liaison, à droite, avec le 33ème R. I. C. ; à gauche, avec la compagnie 3/3 du génie. Le 2ème bataillon occupe les tranchées du 47ème R. I. devant Moncet. Le capitaine BARRIER tient, avec la 7ème compagnie les tranchées à cheval sur la route de Neslesle-Repons-Igny-le-Jard. Un groupe de 100 hommes et une section de mitrailleuses sont établis en retrait entre le bois de Neuville, où se trouve le P.C. du colonel, et la ferme Mont-Murgey. A quatorze heures, le 33ème R.I.C., avant abandonné la hauteur du bois de Nesles, le peloton des pionniers se replie en liaison avec ce régiment, sur le ruisseau de Nesles. A dix-sept heures, le colonel prescrit à la compagnie du génie et au peloton DUSSART (le 33ème R.I.C. continuant son repli) de venir se rallier dans le bois où il se trouve, en arrière des tranchées tenues par le 47ème.

A la même heure, le 60ème bataillon de chasseurs vient se placer à la droite du 47ème R. I. qui se resserre sur sa gauche. A dix-neuf heures, l'ordre de relève parvient au corps. L'opération est exécutée après entente avec le 47ème R. I. A minuit, tous les éléments du régiment ont rallié l'arbre de Napoléon et, de là, sont dirigés sur la ferme du Rosset où ils doivent bivouaquer.

Des renseignements recueillis en fin de combat, il résulte que les Allemands, ayant franchi la Marne entre Dormans et Vinvelle, ont progressé par le ravin de Vassy. Ils étaient à Bouquigny, qu'aucune démonstration n'avait encore été faite sur le fro du bataillon aux avant-postes. Quant aux bataillons de soutien, ils combattirent face à la Marne, mais furent également pris de flanc par les colonnes ennemies débouchant du ravin de Vassy, qui nous séparent du 73ème. Le 2ème bataillon parvint, en partie, à se replier sur la forêt de Bouquigny et, de là, dans la direction de Moncet. Le 3ème bataillon fut encerclé par des colonnes allemandes passant par le nord de la forêt de Bouquigny et, de là, dans la direction de Moncet ; déjà très éprouvé par le tir d'artillerie, il résista avec la dernière énergie et jusqu'à épuisement complet de ses munitions.

La section de mitrailleuses du sergent SAMAIN, placée au pont du chemin de fer, au nord de la ferme Amour-Dieu, brûla jusqu'à 8000 cartouches sur les colonnes allemandes débouchant de Bouquigny vers Amour-Dieu. La section du sergent PREGALDIN, de la 5ème compagnie, ne se replia qu'après avoir brûlé toutes ses munitions et assuré le repli des mitrailleuses qui l'appuyaient.

En avant de Nesles-le-Repons, une escouade prit sous son feu une mitrailleuse lourde qui venait de se mettre en batterie, tua le tireur, s'élança sur la mitrailleuse, l'emporta ainsi que les munitions et la retourna contre l'ennemi.

Pour la troisième fois, en moins de six semaines, le régiment venait d'être saigné à blanc. En ces dernières journées, le 33ème de Dormans fut l'égal du 33ème de Chaudun et de Cutry.

Le 16, au petit jour, le régiment arrive à la ferme du Rosset. Dans la journée, il est procédé à la réorganisation l'encadrement des éléments revenus de la bataille.



Haute Alsace (Août - Septembe 1918).



Après le terrible choc de Dormans, le régiment fut retiré de la lutte, pour être transporté par voie ferrée dans les cantonnements de repos de la Franche-Comté. Regroupé dans la région de Coulome-la-Montagne et de Broussy-le-Grand, il s'embarque le 23 juillet pour arriver le 24 à Héricourt près Montbéliard. Successivement, l'état-major et la C.H.R. gagnent Aibre ; le 1e bataillon Chavannes et le Vernoy ; le 2ème bataillon Verlans et le 3ème Tremoins. Le 33ème, reformé avec des éléments provenant surtout du 273ème, récemment dissous, reprend rapidement cohésion.

Le 14 août, le régiment gagne, en une étape, Bessoncourt, Denney et Pfaffans, villages situés à mi-chemin entre Belfort et l'ancienne frontière d'Alsace.


Entrée en Alsace.


Le 15 août, dans l'après-midi, le régiment se met en marche pour gagner l'Alsace par la belle route de Rougemont-le- Château. Dans la soirée du 15 août, le régiment arriva à Massevaux. L'accueil y fut des plus chaleureux. Le séjour à Massevaux devai être de courte durée. En effet, le 22 août, le signal du départ est donné. La division doit aller occuper le secteur à l'extrême droite du front français appuyé à la frontière suisse.

Après de courtes étapes, le régiment arrive dans l'âpre région de la Suarcine, plateau à cheval sur la trouée de Belfort. Il est en réserve, pendant que le 73ème R.I. et le 3ème tirailleurs prennent la garde sur le front de la vallée de la Largue. Il s'agit maintenant de conserver et de défendre le sous-secteur de Rechesy. Ce petit village présentait cette particularité, avant la guerre, d'être situé à proximité de la borne des « Trois Nations » (France, Alsace, Suisse). Le lieutenant- colonel y installe son poste de commandement. Les trois bataillons du régiment prennent la place des trois bataillons du 3ème tirailleurs

A plusieurs reprises, l'ennemi tente des incursions, d'ailleurs sans résultat, dans nos lignes, notamment le 13 septembre. Le 28 septembre, un détachement de volontaires du 33ème, exécute, avec appui d'artillerie, un coup de main sur les tranchées ennemies et attaque un poste important, situé sur la croupe de « Entre Largue ». L'opération réussit, mais malheureusement nous coûta 9 tués et 13 blessés.

Dans la nuit du 3 au 4 octobre, le régiment est relevé par le 3ème régiment de tirailleurs. Il resta hu jours dans les cantonnements précédemment occupés, se préparant, par des exercices appropriés, à la guerre de poursuite à laquelle i allait bientôt prendre part. Le 11 octobre, le régiment fait mouvement et va, par étapes, s'embarquer à Héricourt dans la nui du 15 au 16.



La Poursuite (17 Octobre - 11 Novembre 1918).



L'embarquement du 33ème eut lieu dans cette même gare d'Héricourt, où, deux mois auparavant, il descendait de Dormans, usé par plusieurs semaines de combats sanglants.

Le 15 octobre, il repartait joyeux, avec un matériel complet, un moral solide et le désir de vaincre. Le 17 octobre, le régiment est rassemblé dans la région de Longueuil-Sainte-Marie. Le séjour y sera d'ailleurs de courte durée, car la division passe « en réserve » à l'armée du général DEBENEY, laquelle est en liaison, au nord, avec les Britanniques, au sud, avec l'armée MANGIN. régiment cantonne, dans la soirée du 22, à Bienville ; le 23, à Vauchelles ; le 24, à Ugny-leGrand ; le 25, à Flavy-le-Martel. Le octobre, nouveau bond vers le nord. Le régiment, en fin de marche, s'installe dans les caves et abris qui sont les seuls vestiges de villages, naguère prospères.

Le régiment restera dans cette situation jusqu'au 31 octobre. Le 31 octobre, la division poursuit sa marche parallèlement au cours de l'Oise. Le 5 novembre, le régiment, réserve de la division, bivouaque dans la forêt d'Andigny. Il pleut sans arrêt ; on passe la journée et la nuit sans abri, sans feu, mais personne ne songe à se plaindre ; les nouvelles sont bonnes, chacun est impatient d'avoir sa part de gloire.

Le canal de la Sambre vient d'être franchi brillamment sur des passerelles improvisées ; Guise est entre nos mains ; à notre gauche, les Britanniques marchent en direction d'Avesnes. Partout c'est la poussée irrésistible qui se prépare. Le 7, le régiment traverse les villages de Bergues-sur-Sambre, Barzy, Beaurepaire, hier encore occupés par l'ennemi. Vers quinze heures, le régiment, qui est réserve d'avant-garde de la D. I., vient s'installer, en cantonnement d'alerte, à la ferme du Condor et dans les habitations avoisinantes, entre Avesnes et Etroeungt. Dans cette région où les routes ont été détruites, l'artillerie a de la peine à suivre son infanterie ; en toute hâte, des ponts de fortune sont improvisés pour le passage du léger 75, tandis que l'artillerie lourde reste en arrière, ainsi que les convois. La poussée se ralentit afin de permettre à l'artillerie de rejoindre les colonnes. Une grande nouvell circule dans les rangs : les plénipotentiaires allemands sont entrés dans nos lignes, hier soir, à vingt heures vingt, à 10 kilomètres du point où stationne le régiment. Les nouvelles deviennent encore meilleures. Toutes nos armées progressent en direction de la Meuse ; les Américains ont franchi cette rivière à hauteur de Dun ; Sedan est sous notre canon.

Le 9 novembre, la division reprend son mouvement vers l'est, franchit la grande route d'Avesnes à Lacapelle. En fin de journée le 33ème va stationner à Rainsars. Dans la nuit du 9 au 10 novembre, le régiment, jusqu'alors en réserve de division, reçoit enfin l'ordre de se porter, tout entier, en avant-garde de la division, à la lisière Est du bois de Trélon, entre Eppe-Sauvage et Moustier-en-Fagne.

Vers trois heures du matin, les bataillons quittent leurs cantonnements. A huit heures trente, la tête du régiment atteint la scierie de Trélon, point à partir duquel doit être pris le dispositif d'approche. Dès sept heures, nos patrouilles de cavalerie avaient parcouru la forêt, que les Allemands venaient d'abandonner, en abattant les plus gros arbres pour les transformer en abatis.

Les 2ème et 3ème bataillons se dirigent sur le carrefour Saint-Herman pour se porter ensuite : Le 2ème bataillon sur Eppe-Sauvage et Montbliard ; Le 3ème bataillon sur Moustier-en-Fagne.

Des mitrailleuses sont signalées sur la route carrefour Saint-Herman, Eppe-Sauvage, au nord du ruisseau de Voyaux. Le commandant DOU (2ème bataillon) décide d'enlever la résistance par débordement. A onze heures trente, le ruisseau est franchi, à onze heures quarante-cinq, les mitrailleuses sont dépassées. De son côté, le bataillon MARCHAND (3ème) se porte à l'attaque de Moustier. A onze heures trente, la 9ème compagnie s'empare des premières maisons de Rue-du-Bout-la-Haut. Dans le village de Moustier, la progression est plus difficile. Les mitrailleuses allemandes, dissimulées avec soin, crépitent sans arrêt, balayant toute la zone de terrain dans laquelle doit progresser le 3ème bataillon.

A dix-sept heures, la ténacité de nos braves soldats a raison de l'obstination du Boche ; les sections de tête du bataillon MARCHAND s'emparent du carrefour central de Moustier. A midi, la chaîne de tirailleurs du 2ème bataillon est arrêtée à 500 mètres au sud de la Croix du Soldat, à la lisière « est » de la forêt de Trélon. Là aussi de violentes rafales de mitrailleuses ennemies barrent le chemin. Il faut à nouveau opérer par débordement. L'ennemi se replie en s'accrochant désespérément a terrain.

Votre première ligne est alors portée au carrefour de la Croix du Soldat, débouché important de la forêt de Trélon. Bientôt ce point est dépassé, et, à seize heures, nos patrouilles ont quitté le sous bois. Elles sont accueillies par de violentes rafales de mitrailleuses, partant du chemin d'Eppe-Sauvage, Château des Voyaux et des premières maisons de la Rue-des-Couturelles ; trois hommes sont blessés.

A vingt heures, le 3ème bataillon atteint la lisière d'Eppe-Sauvage, toujours occupée. Les mitrailleuses tirent sans arrêt, sans pour cela retarder la marche de nos braves éclaireurs. A vingt-trois heures, le bataillon MARCHAND a assuré la liaison à droite avec le bataillon CARY, du 411ème, une section du 1er bataillon, à la ferme Goris, relie les deux bataillons de première ligne.

A minuit, les 9ème et 10ème compagnies sont arrêtées sur le ruisseau de Moustier-en-Faye ; sans retard, des passerelles sont établies sous le feu des mitrailleuses qui balayent les deux rives. A cinq heures, de bonnes nouvelles arrivent des premières lignes : l'ennemi se replie et cède du terrain sur tout le front. A cinq heures quinze, la frontière est franchie et nos soldats pénètrent en Belgique. A neuf heures, le 33ème est en entier sur le sol de Belgique.

On marche sans arrêt, on gravit à toute allure les pentes de la côte boisée qui conduisent sur le grand plateau où s'élève la ferme du Crolet (territoire de Chimay). Notre front atteint, vers dix heures quarante-cinq, la ligne 2 kilomètres « est » de Monbliard, Ruisseau-d'Eppe et d'Osterne.

Onze heures. Comme par enchantement le feu cessa ; le grand drame était fini. Ce fut d'abord de la stupeur ; les homme se regardaient sans mot dire, comme au sortir d'un rêve. Le régiment salua ses morts et son drapeau.





Henri DUNEIGRE décède le 6 janvier 1919 à l'hôpital de Héricourt (Haute Saône) des suites de ses blessures de guerre.